Sur le chemin incertain des vies errantes, il est fréquent de trouver la porte fermée, pour ne pas dire les portes fermées. Trouver visage de bois, dit-on aussi, qui dit peut-être encore mieux que derrière les portes fermées se cachent les visages d'hommes et de femmes gagnés par la méfiance. Cela lui arrive moins aujourd'hui, cela lui arrivait souvent quand il avait les cheveux longs de ses vingt ans et qu'il cherchait un peu de chaleur, sous une forme ou une autre. Il lui arrivait alors de dormir sur le seuil de ces portes et de se cailler les couilles.
Mais venait à l'aube à l'heure du réveil la possibilité de reprendre la route, de s'y mettre à la marge jusqu'à ce qu'un camion ou une voiture s'arrête. Il y a le souvenir de rencontres qu'il garde pour les mauvais jours, le souvenir d'une porte ouverte et de l'invitation à passer quelques jours chez une parfaite inconnue, le souvenir de cognacs cafés payés par un routier pour le réchauffer et en finir avec ses tremblements, le souvenir de discussions à bâtons rompus qui ne menaient nulle part mais qui nourrissaient l'imagination.
Et puis il y a la mémoire prise en défaut, comme avec cette photo. Et c'est sans doute mieux pour laisser à chacun le soin d'inventer ou de réinventer sa propre histoire, en se nourrissant de ses propres souvenirs, d'écrire le scénario qui va avec, de tourner dans le ciboulot le bout de film qui ferait raccord et de faire venir une musique à en chialer. Tiens, puisque j'en parle, je suggère Karen Dalton.
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